Intéressons-nous aux tribulations récentes de la Maison Universelle sise 194, boulevard de la Plage.
D’abord villa Marie Louise elle était devenue la Maison Universelle dont un guide de 1892 disait que son stock permettait « de meubler un chalet, de quelque importance qu’il soit, dans les 24 heures ». Cliquez pour agrandir.
Dans un commerce un stock trop important est signe d’une mauvaise gestion laquelle avait assez rapidement conduit cette Maison Universelle à la déconfiture.
Si bien qu’à l’audience des criées du 4 mars 1897 du Tribunal Civil de Bordeaux, Paul Soulié-Cottineau se rendait adjudicataire de cette maison pour un prix de 35 000 francs.
Cinq ans plus tard, le 9 mars 1902, ce nouveau propriétaire la donnait à la ville d’Arcachon “sous les diverses charges et conditions suivantes, que M. Soulié-Cottineau impose à la ville donataire”.
Voici exactement ces conditions et charges :
« 1° – L’immeuble objet de la donation portera le nom de « Maison Paul Soulié-Cottineau ».
2° – Il sera affecté autant que possible à une oeuvre humanitaire, telle que hospitalisation de vieillards, sanatorium ou à défaut à un service public, dépendant soit de l’État, soit de l’administration municipale.
3° – Au cas où la ville recevrait une redevance quelconque pour loyers de l’administration tributaire, cette redevance serait versée au bureau de bienfaisance avec mention de la provenance du don “Soulié-Cottineau” ».
Le Conseil Municipal acceptait la donation et les affaires maritimes s’installaient dès 1905 dans la maison qu’elles louaient à la ville.
La Maison Universelle devenait l’Inscription Maritime.
Elle le restait jusqu’en 2007, soit durant plus d’un siècle.
À cette date, les Affaires Maritimes quittaient la maison on ne sait pas pour quelles raisons.
L’Inscription Maritime était vendue à Bouygues qui s’engageait dans la commercialisation d’un immeuble d’habitation en béton qu’il entendait construire en lieu et place de cette très belle maison.
Las, quelqu’un s’apercevait que compte tenu de la donation de 1902 cette vente n’était peut-être pas très régulière.
Ce qu’il s’empressait de faire.
« En 2010, la commune a sollicité l’accord des héritiers de Paul Soulié-Cottineau en vue de leur renonciation au bénéfice des charges et conditions stipulées, afin qu’il soit procédé à l’aliénation du bâtiment ».
La grande majorité de ces héritiers, ou peut-être même tous, ont refusé de donner cet accord.
Si bien que « par actes d’huissier datant du mois de novembre 2012, la commune d’Arcachon a fait assigner les dix-huit héritiers qui ont refusé de donner leur accord en vue d’obtenir la révision judiciaire des charges. »
Il y a des jours où l’on ne devrait pas se lever.
Et il ne faut pas réveiller le chat qui dort.
« Par jugement du 5 mai 2015, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :
– déclaré recevable la demande de révision des charges et d’autorisation d’aliéner,
– déclaré recevable la demande reconventionnelle en révocation,
– débouté la commune d’Arcachon de sa demande,
– prononcé la révocation de la donation,
– ordonné en conséquence le retour de l’immeuble dans les mains des héritiers de Paul Soulié-Cottineau,
– condamné la commune d’Arcachon à réparer le préjudice subi par les héritiers à raison du défaut d’entretien fautif et de la dégradation de l’immeuble objet de la donation. »
La commune a fait appel.
C’est le contribuable qui paie les honoraires des avocats.
La Cour d’Appel de Bordeaux a rendu son arrêt le 28 mars 2017 dans lequel elle confirme le premier jugement en toutes ses dispositions…
Et condamne la commune d’Arcachon aux dépens de la procédure d’appel.
Non pas sans avoir fait remarquer au préalable « qu’en l’espèce, la commune admet ne jamais avoir exécuté la première et la troisième condition puisqu’elle estime constant et non contesté que l’immeuble n’a jamais porté le nom Paul Soulié-Cottineau et qu’il est constant et non contesté que la redevance qui a été versée par les Affaires Maritimes n’a pas davantage porté la mention de la provenance du don. »
Voilà comment nous autres, contribuables arcachonnais, avons perdu la propriété de cette maison.
Par l’appât du gain de l’équipe municipale en place.
Mais ce n’est pas fini.
Cette maison est remarquable par son architecture et à l’évidence elle appartient à part entière au patrimoine architectural de notre ville.
Mais curieusement, nos édiles et les divers architectes qui s’occupent de la préservation de celui-ci n’ont pas jugé bon de la classer ERB (Elément Remarquable du Bâti).
Sans doute parce que quand on veut tuer son chien on l’accuse de la rage.
Il faut espérer que maintenant des associations vont prendre sa défense.

La Mairie d’Arcachon pratique, en effet, la rétention d’informations systématique comme stratégie de communication.
Et le journal SudOuest, pour ne pas être en reste, lui emboîte le pas.
Si bien que nous ne savons pas grand-chose de ce qui se passe dans notre ville.
Mais peut-être que les Arcachonnais ne sont pas curieux de nature.
Il ne nous semble pas, par exemple, qu’il y en ait beaucoup qui s’interrogent comme nous pour essayer de savoir pourquoi on a été obligé d’occulter toutes les fenêtres de deux façades sur quatre de l’ancienne maison des associations, sur le cours Tartas.
Sans doute une nouvelle méthode d’isolation thermique encore plus efficace que le double vitrage ?